Bioéconomie 5 min

Biocarburants, biomatériaux : une nouvelle enzyme pourrait changer la donne

Une nouvelle enzyme capable de dégrader le xylane recouvrant les fibres de cellulose du bois ouvre la perspective d’une optimisation significative pour déconstruire la biomasse lignocellulosique et pour traiter la cellulose. Trois brevets relatifs à la production de sucres fermentescibles et à la défibrillation des substrats cellulosiques ont été déposés par l’Inra.

Publié le 25 mai 2018

illustration Biocarburants, biomatériaux :  une nouvelle enzyme pourrait changer la donne
© INRAE

Biodiversité et biotechnologies lignocellulosiques

Depuis plus de 30 ans, l’unité mixte de recherche Biodiversité et Biotechnologies Fongiques (BBF) explore le monde des champignons filamenteux déconstructeurs de bois à la recherche de nouvelles applications industrielles. Le laboratoire dispose d’une importante « bibliothèque de souches fongiques » appartenant au centre international de ressources microbiennes (CIRM). En s’intéressant à un champignon de couleur rouge orangée répondant au doux nom de Pycnoporus coccineus, les espoirs des chercheurs ont été récompensés. Dans une récente publication produite en collaboration avec le CNRS et l’université de York, ils révèlent leur découverte. Il s’agit d’une nouvelle enzyme appartenant à la classe des LPMO (en anglais, Lytic Polysaccaride Monooxygenases), capable de digérer spécifiquement le xylane qui recouvre naturellement les fibres de cellulose du bois. Jusqu’à présent, ce xylane constituait une barrière mécanique, freinant l’action des cocktails enzymatiques employés à la déconstruction de la biomasse lignocellulosique.

Plusieurs brevets dédiés aux LPMO

Malgré des recherches actives, le rendement des cocktails enzymatiques utilisés pour convertir la cellulose en sucres solubles reste problématique. Cet état de fait constitue l’un des obstacles au développement industriel des biocarburants cellulosiques rendant les coûts de la production trop élevés. Après des essais concluants menés sur des fibres de bois de peuplier et de pin, les chercheurs ont déposé en 2016, un brevet proposant une combinaison enzymatique qui permet d’améliorer l’efficacité de transformation de la cellulose en glucose.
Les nanofibrilles de cellulose et les nanocelluloses sont couramment employées dans les industries papetières, pharmaceutiques, cosmétiques, alimentaires en tant qu’additifs dispersant ou stabilisant aussi bien que pour la fabrication de nouveaux matériaux composites. Leur fabrication nécessite une étape de délaminage des fibres de cellulose, étape particulièrement énergivore. Les solutions alternatives proposées comme, l’action de cellulases ou bien le traitement par oxydation chimique génèrent soit des fibres de qualité très variable, soit des effluents fortement pollués. En collaboration avec les chercheurs de l’UMR BBF, des scientifiques de l’unité de recherche Biopolymères Interactions Assemblages (Nantes) ont montré que les LPMO pouvaient être mises à profit pour créer des brèches dans la structure cristalline des fibres de cellulose, facilitant leur fractionnement ultérieur. Deux brevets déposés en 2015 et 2017 proposent un nouveau procédé enzymatique de défibrillation de substrats cellulosiques. Les travaux entrepris depuis visent plus généralement à évaluer l’action des enzymes LPMO sur des substrats plus complexes.
Des discussions sont actuellement en cours pour l’utilisation de ces enzymes sur des applications industrielles, des opportunités de partenariats restent ouvertes.

BBF : un acteur majeur dans la recherche sur les LPMO

Voilà plus de 6 ans que les chercheurs de l’UMR BBF se penchent sur cette nouvelle classe d’enzymes. Expérimentant de nouvelles approches visant à explorer la diversité enzymatique fongique, ils sont à l’origine de la découverte de la famille AA14 selon la classification CAZy spécifiquement active sur le xylane recouvrant les fibres de cellulose dans le bois. Aujourd’hui, leur compétence est reconnue à la fois pour leurs travaux en génomique, pour la caractérisation physico-chimique et fonctionnelle des enzymes ainsi que pour la production par génie génétique de souches productrices de LPMO ensuite testées à l’échelle du laboratoire.

 

Anne Frinault Rédactrice

Contacts

Jean-Guy Berrin UMR Biodiversité et biotechnologie fongiques (INRAE, Univ. Aix-Marseille)

Le département

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